Novembre
2006
Un collègue
médecin diffuse un e-mail à tous les médecins et à tous les infirmiers. Son
message est le suivant :
« Si Rachid était
soignant, ça serait une assez bonne vision de « l’hôpital
2007 ». »
A ce message, il
joint une photo intitulée : « La France au travail »
Ce genre de message est « halal »
[qui veut dire « permis »] au centre hospitalier de Cholet.
« Rachid » serait-il accepté tant qu’il accepterait en silence, et sans se
redresser, « son trou », « sa corvée » … sous-payé, assistant,
interne, faisant fonction d’interne, étudiant, …etc. Ou au mieux, tant qu’il
accepterait le rôle de « doulos » et de « vassal » qui lui
serait assigné ?
Maghrébitude ?
Février 2006, trois échanges
-
Un médecin (aux nom et prénom « bien
français ») et membre du conseil de l’ordre diffuse le message
suivant :
« Objet : Les 12 caricatures de Mahomet. Voici les 12 dessins. Faites-vous
votre propre opinion. Quelle qu’elle soit, ces dessins valent-ils une
excitation hystérique, des attaques et des menaces de mort, en particulier dans
les pays interdisant carrément les autres religions, et à Gaza tant aidée par
l’UE ? Et ces dessins caricaturent-ils Mahomet ou plutôt ce qui est fait
en son nom ? Deux journalistes jordaniens ont été assez courageux pour
publier ces dessins et ont été arrêtés. Le rédacteur en chef du journal
jordanien Shihane a signé un éditorial en posant la question :
« Qu’est-ce qui pose plus préjudice à l’Islam, ces caricatures ou bien les
images d’un preneur d’otage qui égorge sa victime devant les caméras
[…] ? »
-
Un autre médecin (aux
nom et prénom « exotiques ») lui répond :
« C’est un débat dépassé et ce n’est pas encore, et heureusement,
un problème religieux. Quel que soit le « déclencheur », la haine des
uns envers les autres se reproduira tant qu’on ignore et on ne respecte pas la
différence de l’autre. »
-
Cette réponse déclenche la réaction d’un autre
médecin, un chef de service devenu responsable de pôle [un pôle regroupe plusieurs services] et membre du conseil exécutif de l’hôpital :
« Respecter l’autre et sa différence, c’est pouvoir en parler
librement, avoir la liberté de l’expression est de pouvoir garder sa liberté
une fois qu’on s’est exprimé, la radicalisation de l’islam, et le monde arabe
et musulman ne sont pas pour le moment un exemple dans ce domaine. »
Février 2004, ce même médecin diffusait un message dont voici
un extrait :
« Objet : suite à une garde … tu nous as
déjà expliqué que t’as eu la peau à un
marocain est ce que le syrien
est ta prochaine cible ? »
Décembre 2005
Lors d’un échange
concernant les soins palliatifs, un autre médecin nous écrivait publiquement
notamment ceci :
« … Le médecin catholique que je suis ne peux pas permettre que
l’on véhicule dans l’hôpital entier une telle idée comme normale. C’est un
débat éthique grave … ».
-
L’exigence de laïcité concernerait-elle uniquement les patients ?
Certains patients ?
-
Pourrait-on également accepter des affirmations similaires comme « ….
Le médecin juif, ou musulman, ou … etc., ou athée, ou … etc., que je suis ne
peux pas permettre que … » ?
Me permettez-vous une
analyse ?
En écrivant « Le
médecin catholique que je suis … », cette collègue n’aurait-elle pas
fait preuve de franchise et de courage ? Combien de personnes pensent, de
façon consciente ou non, la même chose (de leurs croyances respectives) sans
pour autant l’affirmer ouvertement ?
Cette collègue voudrait-elle dire :
« Ma religion fait partie de moi » ?
Devrait-on la rejeter pour
cela ?
C’est, peut-être, la
même chose pour tel ou telle patient(e) qui vient à l’hôpital …
Le temps d’une
consultation, on voudrait que le patient, avec les valeurs qui sont les siennes
et sur lesquelles il est construit, deviennent un autre individu … en un temps
record !
La décision d’une
patiente qui, par exemple, refuse d’être auscultée par un médecin masculin
serait-elle nécessairement motivée par une question d’ordre religieux ? Ce
refus ne pourrait-il pas traduire simplement une gêne, ou matérialiser une
pudeur ?
Et les hommes ?
Existerait-il des patients (hommes) qui refusent de se faire ausculter par une
femme ?
Un patient
viendrait-il à l’hôpital pour vivre avec les soignants ? Ne serait-il pas
simplement de passage ?
Accessoirement, il
semblerait difficile d’imposer au patient une règle commune lorsque les
soignants, eux-mêmes, éprouveraient des difficultés à respecter ladite règle.
Novembre 2012
Un comité de l’hôpital dit « CARE »
(comité d’aide à la réflexion éthique) dont les « débats et réflexions » sont « centrées sur le prendre-soin » nous diffuse une lettre
qui fait état notamment de quelques phrases comme par exemple :
« Une
place est faite aux croyances religieuses … ».
Mais, on nous précise :
« Il y
a des croyances qui interfèrent avec les soins. La croyance de patients est
parfois en opposition avec la prise en charge des soignants » ;
« Il y
a des croyances qui interfèrent avec le « vivre ensemble » ;
… etc.
Je m’interroge sur la portée de telles
affirmations.
-
Quelles sont
ces croyances qui seraient « indésirables » ?
-
Ladite « croyance de patients »
serait-elle « parfois en opposition
avec la prise en charge des soignants » ou plutôt avec les convictions
religieuses de tel ou telle soignant(e) ?
Je crains que des phrases du style « Il y a des croyances qui interfèrent
avec le « vivre ensemble » n’appellent, de façon suggérée et
efficace, une dimension plutôt politique et/ou religieuse. Alors que ce comité
prétend s’intéresser au « prendre-soin ».
Et, je serais amené à soulever une dernière
question :
-
La
politique, avec certaines phrases distillées ici ou là, aurait-elle une
répercussion au sein de l’hôpital public de Cholet ? Ces « petites
phrases » seraient-elles contagieuses ?
Je pense que certains propos et comportements
seraient mieux appréhendés s’ils sont rédigés avec une encre bleu-Marine. Car, cette couleur signe l’original et rappelle la
source.
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