mercredi 28 novembre 2012

"Le pain au chocolat au français ; le croissant au beurre" ; et le mouchoir au choletais !

 « Patere legem quam fecisti »
(Respectes la règle que tu as faite)
C’est l’Etat de Droit.
 
Cher Monsieur François FILLON,
 
Rassurez-vous, il n’y a pas qu’à l’UMP (Union pour un mouvement populaire) où la démocratie serait « malade » …
Les récentes élections à l’UMP et les élections au centre hospitalier de Cholet : même finalité, même combat !
Je ne citerai qu’un exemple. Les faits datent d’environ un an. Ils ont été enregistrés lors des élections organisées dans le cadre du renouvellement des membres de la commission médicale d’établissement (CME) de cet hôpital public dans lequel j’exerce comme praticien hospitalier. Cette commission est une des instances les plus importantes d’un établissement de santé public. Elle est composée notamment de représentants élus des médecins, pharmaciens et sages-femmes. Et pourtant …
Je perçois comme une force qui ne se contrôle plus. On dirait que certains semblent ignorer les limites de leur pouvoir. Certains se seraient échappés de l’Etat de Droit. Mes recours n’ont servi à rien … Le nombre « 12 » voix deviendrait même supérieur à « 13 » voix ! Quant à l’urne, elle a été interdite !
 
On dirait que même les aventuriers de « Koh-Lanta », cette émission française de téléréalité, sont mieux lotis que nous … Ils ont encore le droit à cette urne lors du conseil, malgré leurs conditions extrêmes de survie … Ils n’ont pas un grain de riz mais, ils ont l’urne !
 
C’est dire l’importance de ce hiatus. Et, ce n’est point le seul. Voici quelques faits non exhaustifs :
 
Mardi 28 juin 2011, 09 : 46
 
La direction porte à notre connaissance le calendrier relatif au déroulement de ces élections pour le mandat 2011/2015. La date limite de dépôts des candidatures est fixée au 12 septembre 2011 inclus.
Mais contrairement aux précédentes élections, cette fois la direction innove. Elle nous impose le « vote par correspondance » comme seul et unique moyen de vote. L’urne serait devenue indésirable … L’urne est interdite malgré les réclamations exprimées.
Parallèlement, les représentants des autres catégories de personnel, eux, ont eu le droit à cette urne. Pourquoi une telle différence de traitement ?
 
Mercredi 07 septembre 2011, 09 : 49
 
J’adresse donc deux interrogations à la direction. Je lui demande d’une part « les modalités permettant de garantir notamment la confidentialité et la sécurité du vote par correspondance » et d’autre part, si « un autre moyen de vote » était « prévu dans les dispositions en vigueur. »
Mes questions restent sans réponse. Cela ne semble inquiéter personne à part moi.
 
Mardi 13 septembre 2011, 15 : 11
 
La première liste des candidats est publiée.
 
Mercredi 14 septembre 2011
 
Le vote par « correspondance » débute alors. Mais curieusement, en fin de cette journée, à 17 : 11, une deuxième liste des candidats est publiée. Celle-ci est également datée du 13 septembre 2011 mais, ne comporte plus les mêmes candidats.
On se retrouve donc avec deux listes différentes datées pourtant du même jour !
 
Jeudi 15 septembre 2011, 17 : 16
 
La date limite de réception des candidatures est finalement prolongée : du « 12 septembre 2011 inclus » elle passe au « mercredi 21 septembre 2011, 17h30. »
Surprenant ! D’autant plus que la direction n’a cessé de nous rappeler l’échéance initialement fixée.
Manifestement, je suis le seul à m’interroger sur une telle procédure. Mes demandes adressées à la direction restent vaines.
 
Jeudi 22 septembre 2011, 14 : 07
 
Une troisième liste des candidats est publiée.
 
Mercredi 28 septembre 2011, 17 : 16
 
La direction nous relance : « Je vous rappelle que les bulletins de vote relatifs aux élections de la CME, scrutin du 23 au 30 septembre 2011, seront réceptionnés … jusqu’au vendredi 30 septembre 2011, 17h. »
Ce message m’amène à interpeller à nouveau la direction. A 17 : 44, je l’interroge :
« Peut-on nous imposer comme seul moyen le vote par correspondance ? Que dit la loi, le règlement, la jurisprudence, …etc. ? »
 
Jeudi 29 septembre 2011, 17 : 05
 
La direction m’adresse enfin une réponse : « … le III de l’article R. 6144-4 du Code de la santé publique indique que la convocation ainsi que l’organisation des élections de la CME incombent au Directeur de l’Etablissement. Après confirmation auprès de l’ARS [agence régionale de santé], le vote par correspondance a été retenu. »
 
Observations
 
Face à de tels faits inhabituels, je me sens incapable de prendre part à ce soi-disant « vote ». Y participer reviendrait à admettre le bien-fondé d’une telle manœuvre. Et, ladite « confirmation auprès de l’agence régionale de santé » ne préjuge pas de la régularité d’une telle procédure.
Si effectivement, il incombe au directeur d’organiser matériellement ces élections, il me semble que les modalités de déroulement des opérations de vote devraient respecter les principes généraux du droit électoral. Le vote par correspondance n’est valable qu’à titre exceptionnel. Que s’il est réservé à certaines catégories de salariés en raison de circonstances particulières : travail de nuit et/ou à l’extérieur de l’établissement ; absence pour maladie, congé, ou accident ; … etc.
L’exception ne saurait être généralisée. Le vote physique, le vote sur place, doit rester le principe. Interdire l’urne reviendrait à dénaturer le sens du vote. Le vote à distance n’apporte pas les mêmes garanties que le vote sur place. Ma demande est concordante avec les dispositions règlementaires et jurisprudentielles. Le vote physique est une disposition d’Ordre Public Absolu et, aucun accord ne peut y déroger. Il en va de la sincérité du scrutin. (Cf. également les dispositions de l’article 10 de l’arrêté du 03 novembre 2005 modifié fixant la procédure des élections aux commissions médicales des établissements publics de santé. Dispositions qui figuraient déjà dans l’arrêté du 24 octobre 1994 et notamment ses articles 11 et 12.)
Le vote physique (sur place) est prioritaire par essence puisqu’il est de circonstance normale.
 
Vendredi 30 septembre 2011, 18 : 31
 
Les résultats de ce soi-disant « scrutin » sont publiés. Le dépouillement a eu lieu en présence notamment de trois représentants de la direction et du président de la CME sortant. La clôture publique du « scrutin » sous le contrôle des électeurs et des délégués de liste ne semble pas avoir été réalisée. Aucune proclamation orale du résultat du « scrutin » ne semble avoir été effectuée par le président du bureau de vote. Ce président n’est d’ailleurs pas identifié …
 
Conséquences sur le résultat du « scrutin » et sur le fonctionnement de cette instance
 
-     Les candidats de la « deuxième et troisième vague » sont élus comme titulaires.
-     Neuf « disciplines » ne sont plus représentées au sein de cette instance alors que d’autres spécialités s’y voient attribuer jusqu’à cinq ou six sièges.
Ce qui contrevient aux dispositions de l’article R. 6144-3-2 du Code de la santé publique selon lequel « la répartition et le nombre des sièges au sein de la commission sont déterminés, pour chaque catégorie, par le règlement intérieur de l’établissement qui assure en son sein une représentation minimale et équilibrée de l’ensemble des disciplines de l’établissement. »
 
Et que dire de l’inexistence dudit règlement intérieur de l’établissement ? Ce document aurait dû être élaboré, avant ces élections, puis soumis à l’avis de la CME (article R. 6144-1 du Code de la santé publique), et à celui du conseil de surveillance (article L. 6143-1 du Code de la santé publique).
 
-     Le premier élu comme « suppléant » a récolté 15 voix ; tout comme le dernier élu comme « titulaire ». L’âge ayant permis de les départager. Le président sortant de cette commission a récolté 14 voix …
 
Concernant ma candidature que j’avais déposée en même temps que les collègues de la « première vague », elle récolte 13 voix sur 20 suffrages exprimés malgré le fait que j’ai renoncé à prendre part à ce soi-disant « vote ».
Je suis donc élu mais seulement comme « suppléant » et ne peux, par conséquent, plus siéger au sein de la CME. Pourtant, mes fonctions de responsable de la pharmacovigilance et de la coordination des vigilances sanitaires sont en adéquation avec les attributions de cette instance. Celles-ci sont consacrées par l’article R. 6144-1 et l’article R. 6144-2 du Code de la santé publique. Ce dernier dispose que « La commission médicale d’établissement contribue à l’élaboration de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins, …, prévenir et traiter l’iatrogénie [évènements indésirables] et les autres événements indésirables liés aux activités de l’établissement ; les dispositifs de vigilance destinés à garantir la sécurité sanitaire ; la politique du médicament … ».
 
A l’hôpital de Cholet, « le 12 deviendrait supérieur au 13 ! » …
 
Plus tard en effet, une candidate qui a récolté seulement 12 voix (donc moins de voix que moi), sera désignée comme membre de cette commission médicale d’établissement !
D’autres collègues, qui n’ont pas été élus comme titulaires, seront également « repêchés » ! Sur quels critères ?
Une autre collègue a été déclarée membre de cette instance bien avant le vote !
Comprenne qui pourra …
 
Discussion
 
Pourrait-on accepter de tels faits dans une entreprise privée ?
Dans une société démocratique comme la France, cette obstruction grossière porte atteinte à une liberté fondamentale. Celle qui me permet d’accéder à cette « boîte » qu’est l’urne.
Vers cette urne, je me déplace. En toute sérénité et en toute confidentialité, j’y introduis mon bulletin de vote secret renfermant et entérinant ma décision prise en mon âme et conscience. Et, j’aimerais bien que mon bulletin soit pris en compte.
Une simple « boîte » mais, un symbole fort. C’est le moyen de l’expression démocratique pour lequel certains ont dû perdre leurs vies pour l’obtenir. C’est une direction vers laquelle d’autres citoyens du Monde aimeraient bien pouvoir se diriger, un jour.
 
Mes recours
 
Mon recours auprès notamment de l’agence régionale de santé comme celui auprès du ministère de la santé ne recueillent aucune considération.
Saisi, le juge des élections auprès du tribunal d’instance se déclare finalement incompétent pour connaître de ce litige.
J’ai même sollicité le ministère public. Toujours en vain.
Je me suis résolu à ne pas introduire de recours auprès du tribunal administratif eu égard, notamment, à la lenteur de cette procédure.
 
Monsieur François FILLON, je me suis senti bien seul contrairement à vous et à Monsieur Jean-François COPE …
 
In fine, la récompense que j’ai eue
 
Quelques mois après, je suis surpris de recevoir un document inattendu. C’est le règlement intérieur de l’établissement dont j’ai souligné l’inexistence dans mes différents recours.
Ce tout nouveau règlement, fraîchement pondu, est daté de novembre 2011. A posteriori des élections !
En le consultant, je ne suis plus étonné. Il a été décidé de ne pas y mentionner les deux unités fonctionnelles (UF) placées sous ma responsabilité : « UF 1024 : pharmacovigilance » et « UF 1025 : CTIAP (centre territorial d’information indépendante et d’avis pharmaceutiques) ». Tous les services et unités fonctionnelles du pôle 6 [un pôle regroupe plusieurs services hospitaliers] y sont listés excepté ces deux unités « fantômes ». Je n’existerais plus. Je suis ostensiblement « rayé de la carte ».
Mais, dans mon « cachot » auquel je me suis habitué, je devrais continuer à accomplir les tâches de basse besogne …
 
Qu’en pensez-vous Monsieur François FILLON ?
 
On pourrait éventuellement en discuter si vous me faîtes l’honneur de m’inviter à un petit déjeuner ou un goûter. Mais, je devrais me souvenir de ce proverbe dont j’ai oublié l’auteur : « Les pains au chocolat au français ; les croissants au beurre »
 
En attendant, il ne me reste plus que les « mouchoirs » … Car ma voix demeure inaudible et mon encre invisible.
 
« Les aventuriers de la tribu réunifiée ont décidé de vous éliminer et leur sentence est irrévocable. »
Koh-Lanta, fin du conseil
 
Dans l’attente de vos éventuelles nouvelles,
Bien à vous.