Au nom de la laïcité, devrait-on priver nos enfants d’un enseignement,
ad hoc, d’une culture religieuse au sein de l’école publique de la République
Française ?
L’ignorance génère la peur. A son tour, la peur produit de la méfiance
envers l’inconnu. Voire de la haine envers l’étranger …
Nul ne peut contredire le fait que la question des religions constitue
un véritable thème de société. Un sujet qui, force est de constater,
conditionne les rapports humains. Tous les pays sont concernés. La France a
fait le choix de la laïcité. Un principe auquel je suis profondément attaché. Mais,
dans sa mise en œuvre, cette laïcité ne serait-elle pas devenue, elle-même, une
autre « religion » ? La question mériterait d’être posée.
A titre personnel, bien que n’étant pas un spécialiste du domaine, je
pense, à tort ou à raison, que la religion devrait relever non seulement de la sphère privée mais
également de la croyance intime et propre à chaque individu. Pourquoi l’époux
devrait-il « imposer » sa religion à son épouse et,
inversement ? Ne serait-il pas préférable et judicieux de respecter les
enfants en leur laissant la possibilité et l’opportunité de choisir, ou non,
librement leur(s) religion(s) ?
La croyance serait-elle un héritage qu’on pourrait léguer, de force, à
autrui dès sa naissance et, sans le consentement éclairé de l’intéressé ?
On dénonce régulièrement le risque de « communautarisme ».
Dans le même temps, chaque « communauté » se charge de l’enseignement
d’une religion donnée. Pourquoi n’enseigner qu’une seule religion ?
N’existerait-il pas un continuum entre plusieurs religions ? Quelles sont
leurs valeurs communes ? Quelles sont les différences qui les
distinguent ? Pourquoi se priver d’une étude comparative, neutre et
objective qui permettrait, peut-être, de démontrer que les
« querelles » à ce sujet ne sont pas justifiées ?
La laïcité serait-elle synonyme d’homogénéisation des religions ?
Une religion « nouvelle » devrait-elle « s’aligner »
sur les principes de la religion « dominante » au nom du principe de
la laïcité ? Dans ce cas, pourrait-on continuer de parler de laïcité ou
plutôt d’un autre terme qu’il conviendrait alors d’inventer et, qui pourrait être
ainsi composé : « nom de la religion
dominante – laïcité » ? Comme, par exemple, « Catho-laïcité », « Juda-laïcité », « Islamo-laïcité », … etc.
Dans l’école de la République, on enseigne bien la lecture, l’écriture,
l’histoire, la géographie, la connaissance du corps humain, les langues
étrangères, les chiffres arabes et romains, la philosophie, … etc. Pourquoi ne pas y inclure
l’enseignement éclairé des religions, des cultures du monde, selon des
modalités à définir ?
Nous avons le choix entre la matière et l’antimatière … entre la
consistance et le vide … entre les explications d’un Maître et les
interprétations approximatives … entre la vérité et les préjugés … entre la
connaissance et l’ignorance … entre la lumière et l’obscurantisme … entre la
paix et la haine … entre la cohésion et la division …
Et si, tout simplement, un citoyen ressentait le besoin d’aller au
Temple un jour, à la Mosquée le vendredi, à la Synagogue le samedi, à l’Eglise
le dimanche, … etc. ? … Rien que par intérêt intellectuel … pour découvrir
… pour apprendre … pour partager un moment de fraternité avec des gens inconnus
… Rien que pour la beauté des lieux et du verbe …
Et si, tout simplement, un citoyen, connu comme étant « joyeux et
gourmand », avait envie de « s’inviter » à la table de telle ou
telle fête dite « religieuse » ? Rien que pour l’ambiance
festive, pour l’odeur des plats servis, pour les arts culinaire et musical …
Pourquoi ces frontières ? Ne pourraient-elles pas réduire l’intelligence ?
L’école de la République participe à la construction du citoyen de
demain. Dans cette école, l’enfant pourrait recevoir des informations utiles et
sincères qui l’aideraient à forger sa propre opinion. Il pourrait développer
son esprit critique. Il pourrait apprendre à « dire non », le cas
échéant. Il pourrait ainsi choisir son propre chemin. Librement.
Enfin, ce n’est qu’un avis qu’on peut, ou non, partager.
« C’est par la vérité qu’on apprend
à connaître les hommes, et non par les hommes qu’on connaît la vérité »
Emir Abdelkader