C’était dans mon rêve …
La mission d’un hôpital public peut se résumer en trois lettres :
« PSG ». Comme « Prévenir », « Soigner », et
peut-être « Guérir ».
L’état dans lequel se trouve notre hôpital public me conduit à soumettre
quelques nouveaux éléments de réflexion, non exhaustifs. Pour éviter notamment
que la « base » ne soit sacrifiée, tel un bouc-émissaire, à la place
de quelques décideurs de la « pyramide ».
Il me semble que les solutions se trouvent dans l’analyse des causes qui
ont conduit à un pareil délabrement de notre hôpital public. Peut-être
pourrait-on « tourner la page », mais on ne peut
« déchirer » celle-ci. Les événements du passé dessinent les chemins
de l’avenir. C’est comme dans les films « Le retour vers le futur » …
En préambule, il y a lieu de rappeler qu’il serait vain et illusoire de
vouloir me faire croire que les dysfonctionnements seraient la conséquence du,
seul et unique, manque de moyens. La loi est belle, mais sa mise en œuvre
serait parfois approximative et aléatoire.
Cette situation était prévisible et dénoncée à plusieurs reprises ;
y compris par voie de presse. Mais, en vain.
Notre outil de travail a été mis à genoux. Le désordre a anéanti l’ordre.
La négligence et l’imprudence ont insulté la rigueur. Les « codes
locaux » ont « mis au tapis » les codes légaux. En toute
impunité.
Les compétences médicales, notamment, de différentes spécialités, au
parcours et à l’engagement institutionnel vérifiables, à la stabilité certaine,
au salaire codifié, ont fini par prendre la fuite eu égard à la surdité et à
l’aveuglement démissionnaires. Elles ont laissé la place à quelques
mercenaires, de passage, rémunérés avec des « magots de maharadjah ».
Je ne peux que contempler « la liste » ; la preuve du turn-over.
De la valse. Ça va et ça vient. Instabilité. Insécurité. Précarité. Intérim.
C’est devenu la routine.
Je n’oublie nullement le départ de plusieurs directeurs adjoints
notamment. Par exemple, combien de directeurs financiers se sont-ils succédés sous
le règne de l’intouchable « col blanc » ?
Un hôpital public qui réduit, en le déconsidérant, un seul de ses
services de soins se met lui-même en situation délicate. De façon imagée, c’est
comme une équipe de football (ou autre) qui contiendrait, parmi ses joueurs, un
élément non performant … Et que dire lorsqu’un tel traitement s’applique à
plusieurs services de soins ?
Asphyxier un service de soins étiqueté, par je ne sais quelle
« règle », comme « non rentable » revient à fragiliser
plusieurs autres services de soins dont ceux dits « rentables ».
Méconnaître le lien fort existant entre toutes les disciplines médicales
s’apparente à la destruction d’un « bloc de compétences » ; dont
les membres doivent pourtant avancer, nécessairement, ensemble et dans la même
direction. Méconnaître ce lien, et le « château de cartes »
s’effondre.
C’est comme l’équipe de football qui ne valoriserait que ses joueurs mis
en première ligne : les attaquants …
Pour fonctionner correctement, les services de soins dits
« rentables » ont besoin des avis des spécialistes exerçant dans les
services de soins qualifiés de « non rentables ». Ladite
« règle » a ignoré ce fait. Et, aujourd’hui, l’addition semble lourde.
Pour marquer un but, les attaquants ont besoin des ailiers, des milieux
de terrain, des défenseurs et du gardien de but notamment … et inversement …
Comme si les services de soins qualifiés de « non rentables »
effectuaient les actes pour eux-mêmes ! Alors que ces services ne font que
répondre à une demande des autres services de soins. Mais, peut-être que ces
services dits « non rentables » devraient-ils facturer leurs
prestations aux services demandeurs.
C’est comme si on disait à tous les joueurs de l’équipe de football,
excepté les attaquants : vous ne marquez pas de buts, donc vous êtes
inutiles. On imagine mal une équipe de football dans laquelle seuls les
attaquants seraient correctement habillés avec a minima un maillot, un short, des chaussettes et des chaussures.
J’ai assisté à un étonnant phénomène. Le labile et le volatile ont
remplacé le stable. Le secondaire a supplanté le principal. Le douteux a chassé
la compétence. La ruse et le mensonge se sont développés. L’arbitraire a
prospéré. Les instances se sont transformées en chambres d’enregistrements. Les
procès-verbaux des séances sont devenus « light ». L’appropriation de
l’institution et la censure. Le Management « médico-administratif »
par les preuves a cédé au « management » par la Terreur. Mépris des
patients et des soignants. Corruption des mœurs. Et gare à celle ou à celui qui
tente de s’opposer à un tel écoulement et, qui ose bousculer le statu quo.
Ça « joue », mais on ne sait pas comment faire pour
« marquer un but » tellement l’adversaire est coriace. Et, les
meilleurs « joueurs » sont sur le « banc des remplaçants ».
Priorité aux « anciens moustachus » et aux ami(e)s. Ce sont toujours
les mêmes « joueurs » qui font les parties ; et ces derniers
seraient dotés d’une surprenante faculté qui leur permettrait de
« jouer » à tous les postes. Il y en a même qui « jouent »
à plusieurs postes en même temps ! Une impressionnante capacité de
« dédoublement » …
On ne sait pas faire. Alors, on « joue » au-delà des limites du
terrain : sur la touche, derrière son propre but, dans le vestiaire, …
etc. L’essentiel serait de faire semblant de s’agiter. Seul
« bouger » serait important même si le mouvement est fait dans le
sens inverse. Et, que l’on marque régulièrement des buts CSC (contre-son-camp).
L’intervention épisodique d’un arbitre (l’équivalent de la haute autorité
de santé, ou un inspecteur, par exemple) arrive à remettre temporairement,
l’’instant d’une visite, les « joueurs » et leur
« entraineur » dans le bon sens. Mais, dès que l’arbitre s’éclipse,
les réflexes reprennent leurs us-et-coutumes. Sous le regard désolé des
remplaçants, gonflés à bloc.
Aussi, Madame la « rigueur budgétaire », vous appartiendrait-il
de ne pas se tromper de cible(s) lors des éventuelles mesures, nécessaires, de
redressement que vous serez, peut-être, amenée à prendre.
En effet, ces éventuelles mesures ne sauraient cibler les équipes déjà
squelettiques. Elles ne pourraient se focaliser sur les professionnels de
terrain qui sont au contact direct et permanent de la « poussière ».
Elles ne sauraient sacrifier le travail des « chevilles ouvrières »
dévouées, aides-soignant(e)s, infirmier(e)s, voire agents administratifs, …
etc., aux salaires de « misère ». Elles éviteraient d’appauvrir
l’essence même de nos métiers et, en particulier ceux centrés sur la sécurité
des soins déjà bien malmenés. Elles ne sauraient vider de leur substance les
coopérations existantes, depuis de nombreuses années, et tissées dans le cadre
de réseaux régionaux et/ou nationaux sous prétexte de vouloir récupérer
quelques centaines d’euros par an (correspondant aux frais de déplacements par
exemple). Ces coopérations nous permettent de « sortir du bocal »
pour « prendre un peu l’air » lors de contacts professionnels avec
des équipes hospitalo-universitaires dont la hauteur est toujours maintenue.
Besoin « d’oxygène » …
A mon sens, et dans l’intérêt premier du patient, de tout patient
potentiel, et de notre hôpital public, il serait plus judicieux de
« demander des comptes » notamment aux membres « d’en
haut » dont les décisions sont à l’origine de la situation inquiétante
actuelle. Le « solde de tout compte » devrait leur être soumis. Ils
ne peuvent s’exonérer de leurs responsabilités qu’ils revendiquent et
affichent. Ils ne pourraient non plus les répercuter sur « la base ».
Ils ne peuvent éternellement se cacher derrière le « bouclier :
institution » ; cet étonnant privilège accordé à certains responsables
de la fonction publique. Ils devraient être réduits à leur simple dimension de
« praticien » et/ou « agent », voire de « citoyen ».
Il y a lieu également de s’interroger sur le fait qu’on accompagne,
tranquillement, tel ou tel « chef de service » jusqu’à sa retraite malgré
le fait qu’il a « plombé » ledit service. Ce chef a non seulement
« fait dodo » pendant plus de trente ans, mais en plus il a empêché
ses subordonnés de faire leur travail. Et, je ne parle pas du salaire (13ème
échelon s’il vous plait) qui lui est versé à chaque fin de mois comme un
« jackpot ». Vive la fonction publique à l’hôpital !
Et que dire de ce pôle « vedette »* qui, à lui seul, aspire et
siphonne des ressources et énergies invraisemblables depuis plusieurs
années ? Par exemple, a-t-on chiffré le coût de toutes les réunions et
déplacements consacrés à cet ambitieux projet ? En plus, regardez juste le
nombre de ses praticiens et de ses internes et comparez-les au nombre de lits
pris en charge. Faites vos calculs, posez vos ratios. Et, recommencez la même
opération avec les autres services de soins où certains, bien isolés, risquent
de « crever la bouche ouverte ». Puis, tirez vos conclusions.
L’équilibre serait rompu. La balance serait décalée et mal tarée.
Mais, il est vrai que les artisans d’un tel projet ambitieux font partie
du « premier cercle ». Un « caprice des dieux » ?
Pendant que les autres services de soins sont mis à la « diète » et à
la « cure d’amaigrissement » ? Une « Rolls-Royce »
dans le « désert » ?
(*) : Cf. article intitulé : « L’hôpital public est-il soluble dans le marketing ? »
Publié en septembre 2006 dans une revue nationale avec comité de lecture
(« Le Pharmacien Hospitalier »).
Faudrait-il être « président de la commission médicale
d’établissement » ou « membre du directoire » pour espérer une
réponse positive à un projet professionnel bien documenté et utile pour
l’établissement et ses patients ? Et, à long terme …
Je perçois comme une indécence. Alors que, par exemple, la population
vieillit (nous dit-on) et que les patients âgés ont besoin, pour leur prise en
charge globale, de quelques spécialités médicales bien précises et pointues,
notre hôpital ressemblerait à une « terre brûlée » pour ces
disciplines …
Sauf erreur de ma part, la responsabilité d’un tel effritement ne saurait
être imputée au seul directeur qui, en plus, aurait, semblerait-il, quitté
l’établissement avec les décorations (médailles de la ville et de l’hôpital),
les discours, les sourires, les petits fours, les flashs …
Mais, on connait l’autre face de cette jolie « carte postale »
…
En la matière, quelle est la responsabilité notamment des membres du
directoire (ex. conseil exécutif) ? Du conseil de surveillance (ex.
conseil d’administration) ? De l’agence régionale de santé (ex. agence
régionale de l’hospitalisation) ? … etc. Tous ont été parfaitement
informés dès la constatation des prodromes d’une pareille pathologie
silencieuse et contagieuse.
Mais, les lanceurs d’alertes n’ont reçu que « jets de pierres »
en retour …
Et que penser lorsqu’on constate que ces mêmes individus sont toujours
membres de l’équipe dirigeante actuelle ? On prend les mêmes et on
recommence ?
Alors, dans la mesure où on semble attaché à l’efficience des soins (qui
inclut les trois dimensions inséparables suivantes : qualité, sécurité,
coût), à la rigueur (mot devenu tabou), il faudrait savoir aussi « écouter
les bruits de la soute » tel un pilote d’avion ou un commandant de navire
…
Il y a lieu de ne pas confondre « efficience et
rationalisation » avec « rationnement ».
Il revient aux décideurs qui ont persisté et signé, alors qu’ils avaient
été pourtant alertés à plusieurs reprises, de payer la facture d’un
redressement éventuel.
Ou alors, étant donné que la mission qui est la nôtre peut se résumer en
trois lettres : « PSG ». Comme « Prévenir »,
« Soigner », et peut-être « Guérir ». Et, s’il manque des
fonds, on sait ce qu’il reste à faire …
A tort ou à raison …
Un drôle de rêve !
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